Le cinéma comme «date»?

Même si c’est un classique, j’ai toujours eu l’impression qu’amener quelqu’un au cinéma n’était pas la meilleure idée pour une date. Après tout, si t’es moindrement bien élevé, tu ne parleras pas durant le film, et apprendre à se connaître sans pouvoir s’adresser la parole, ça complique un peu les choses. En fait, on pourrait même dire que vouloir passer deux heures avec quelqu’un sans se parler, ça sonne  plus comme une activité pour les vieux couples. (C’est une blague!)

Ironiquement, c’est en allant au cinéma en solo que je me suis rendu compte à quel point je m’étais trompé. On passe notre temps à attendre quand on va voir un film au cinéma. Surtout quand il s’agit d’une œuvre récente que tout le monde désire voir la même fin de semaine.

En partant, il faut arriver au moins une demi-heure en avance question d’avoir des places qui ont du bon sens. Ça donne plein de temps pour jaser durant les files d’attente et surtout une fois assis dans la salle. Il vaut vraiment mieux être accompagné pour se défouler à deux sur les mêmes trois pubs de produits de beauté qu’on nous passe en boucle ou les questionnaires sans intérêt animés par une stagiaire au français cassé de Vancouver.

Et même dans le choix du film, on apprend une foule d’informations sur notre hypothétique conquête. Si elle propose The Fast and the Furious 4000 ou le dernier film romantico-poche avec Ashton Kutcher et Jennifer Aniston, on peut déjà y aller de nos meilleurs préjugés. Et au-delà des goûts, qui va laisser à l’autre le choix du film?

Allez-vous opter pour un choix unanime? Un compromis? Est-ce que le gars sera galant? La fille d’adon? Y’aura-t-il un snob qui ne veut voir que du cinéma d’auteur très pointu? Une germaine qui est prête à voir n’importe quoi du moment que c’est son choix à elle? Un gratteux qui préfère un film plus long parce que ça revient moins cher de l’heure?

Il y aussi le chemin du retour où l’on apprend à se connaître en discutant de l’expérience cinématographique qu’on vient de vivre. Nos scènes préférées, nos meilleures théories sur le propos du film, combien Brad Pitt nous énerve d’être encore sexy à 72 ans.

Là, j’ai l’air d’évacuer complètement le temps où se déroule le film, mais au contraire, c’est là que fut ma principale erreur. Sincèrement, est-ce qu’il y a quelque chose de plus tripant que les regards durant un film au cinéma? Il fait sombre, mais on arrive à se voir grâce à l’écran qui reflète de la lumière sur nos visages. On a beau se trouver au beau milieu de 200 personnes et pourtant, on arrive à s’y sentir seuls au monde. Une bonne partie de ce que t’as besoin de savoir sur quelqu’un se retrouve dans ces petits regards-là.

Bien sûr, des fois, ça ne le fait pas. La connexion n’est pas là du tout et on sent l’incompatibilité très rapidement. Et dans ces cas-là, vaut quand même mieux avoir un bon film à regarder plutôt qu’être mal à l’aise devant un long repas interminable.